Augustin d’Hippone, dans sa jeunesse

Augustin d’Hippone (latin : Aurelius Augustinus), ou saint Augustin, est un philosophe et  théologien d’origine Berbère / Amazigh, né dans le municipe de Thagaste (actuelle Souk  Ahras, Algérie) le 13 novembre 354 et mort le 28 août 430 à Hippone (actuelle Annaba,  Algérie), dans ce qu’on appelait alors la Numidie. 

Il appartient à une famille berbère de la classe aisée, mais « en voie de  prolétarisation » et qui ambitionne de voir son enfant devenir avocat ou membre de  l’administration impériale romaine. Le couple connaît des tensions liées à la fois aux infidélités du  mari et au fait que l’épouse le trouve « limité ». Elle le convertira malgré tout au christianisme en  371, un an avant sa mort. 

Augustin a un frère, Navigius, qui deviendra supérieure du monastère d’Hippone. Sa culture est  foncièrement latine. Élève doué, mais indocile, il déteste l’école et craint le châtiment de ses  maîtres. 

Le père d’Augustin réussit à faire des économies pour que ses fils puissent bénéficier d’une  éducation classique. Quand il atteint l’âge de quinze ans, Augustin part étudier  à Madaure (actuelle M’daourouch, Algérie). Plus tard, dans les Confessions (livre I), il se  montre critique envers un mode d’enseignement qu’il estime trop centré sur l’éloquence et la  mémoire. Le manque d’argent le contraint à revenir à la maison familiale à seize ans. À cette époque, il commet de menus larcins tel le célèbre vol des poires commis non par besoin,  mais par plaisir de la transgression. Il se le reprochera plus tard et écrira dans son livre  les Confessions : 

« Dans le voisinage de nos vignes était un poirier chargé de fruits qui n’avaient aucun attrait de  saveur ou de beauté. Nous allâmes, une troupe de jeunes vauriens, secouer et dépouiller cet arbre,  vers le milieu de la nuit, ayant prolongé nos jeux jusqu’à cette heure, selon notre détestable habitude,  et nous en rapportâmes de grandes charges, non pour en faire régal, si toutefois nous y goûtâmes,  mais ne fût-ce que pour les jeter aux pourceaux : simple plaisir de faire ce qui était défendu ». 

A dix-sept ans, grâce à une générosité d’un ami du père d’Augustin, plus riche, il part à  Carthage pour continuer ses études universitaires. Là, il connaît une sorte de crise  d’adolescence. Dans un latin flamboyant et un style apprécié des Romains d’Afrique, il avoue : « Je n’aimais pas encore, mais j’aimais aimer et, par un besoin secret, je m’en  voulais de ne pas en avoir encore assez besoin ».  

À Carthage, très vite, il fait la connaissance d’une femme dont il aura un fils, Adéodat. Il partagera sa vie durant quinze ans, dans les liens du concubinage. On ne sait toutefois pas grand-chose de cette compagne. En même temps qu’il se convertit au manichéisme,  Augustin décide d’abandonner le projet que son père et son protecteur Romanianus avaient pour lui, être avocat ou fonctionnaire impérial, pour plutôt devenir enseignant. En 375, il retourne à Thagaste et y enseigne la grammaire. 

Augustin revient assez rapidement à Carthage où il reste jusque vers 382. Un prix de poésie lui permet de devenir familier du proconsul de Carthage. Vindicius, qui, s’apercevant de la  passion d’Augustin pour l’astrologie, parvient à l’en détourner en lui montrant que le succès de quelques prédictions n’est que le fruit du hasard. Ce lien avec un personnage influent lui donne l’opportunité de nouer des relations qui lui permettent d’envisager un départ de  Carthage pour Rome. Il est d’autant plus enclin à quitter Carthage qu’il veut faire carrière et  qu’il trouve ses étudiants indisciplinés. 

La formation qu’il a reçue à Carthage est celle des lettrés romains de l’époque, même si ses  écrits laissent apparaître une sensibilité et des traits liés à sa région de naissance numide, nord-africaine. S’il est un maître de la langue et de la culture latine, il ne maîtrisera jamais réellement le grec, ce qui tendra à accroître les divergences entre le christianisme occidental et oriental. 

augustin d'hippone

Sa conversion

Né d’une mère profondément pieuse, il se convertit d’abord à la philosophie avant de  devenir manichéen. Il n’abandonne le manichéisme et ne se convertit au christianisme  qu’assez tard, en 386, après sa rencontre avec Ambroise de Milan. Après sa conversion, il devient évêque d’Hippone et s’engage dans une série de controverses, orales et surtout  écrites, d’abord contre les manichéens, puis contre les donatistes, et enfin contre  le pélagianisme. Il a laissé une œuvre considérable tant en quantité qu’en qualité. Trois de  ses livres sont particulièrement connus : Les Confessions, La Cité de Dieu et De la Trinité. 

Augustin est le penseur qui a permis au christianisme d’intégrer une partie de l’héritage grec  et romain, en généralisant une lecture allégorique des Écritures suivant le modèle préconisé  par Ambroise de Milan et le néoplatonisme. Toujours à la suite d’Ambroise, un ancien haut  fonctionnaire romain, il incorpore au christianisme une tendance au recours à la force héritée  de la République romaine. Il est le penseur le plus influent du monde occidental  jusqu’à Thomas d’Aquin qui, huit siècles plus tard, donnera un tour plus aristotélicien au  christianisme. Malgré tout, sa pensée conserve une grande influence au XVIIesiècle, où elle  est l’une des sources de la littérature classique française et inspire  les théodicées de Malebranche et de Leibniz. 

Augustin d’Hippone est un penseur exigeant dans tous les sens du terme. Homme clé de l’émergence du moi en Occident, il joue également un rôle de premier plan dans l’évolution de la notion de justice. De son passé manichéen, il garde une forte distinction entre le Bien et le Mal.  Toutefois, le néo-platonisme — qui a fortement influencé sa conversion — l’a amené à une  conception d’un Dieu fort qui, à l’inverse du Dieu faible des manichéens, assure qu’à la fin le  Bien l’emporte.  

En Occident, il est le théologien qui insiste le plus sur la transcendance divine, c’est-à-dire  que pour lui, les pensées de Dieu ne sont pas, de près ou de loin, les pensées des hommes.  Selon lui, la croyance inverse constitue précisément le péché originel. 

Le Dieu d’Augustin est à la fois au-dessus des êtres humains et au plus profond d’eux mêmes. Il en résulte un accent mis sur ce qu’il nomme la trinité intérieure : la mémoire,  l’intelligence et la volonté. Si la mémoire est importante, l’idée de commencement, de  renouveau, est également très présente. La volonté permet de se diriger vers le Bien, mais  n’est pas suffisante ; il faut aussi la grâce. Augustin d’Hippone met malgré tout l’accent sur la capacité  que confère la raison à l’homme de s’approcher de la vérité des choses — La vérité absolue  n’étant pas de ce monde —, dans une perspective qui intègre une dimension spirituelle certaine. En règle générale, la pensée augustinienne est animée d’un double mouvement, de  l’extérieur (le monde) vers l’intérieur, domaine d’un Dieu lumière intérieure ; de l’inférieur (les  plaisirs faciles) au supérieur (la vraie réalisation de soi). D’une certaine façon, ce qui sous tend la dynamique de sa pensée est synthétisé par une de ses plus célèbres formules dans  Les Confessions :

« Tu autem eras interior intimo meo et superior summo meo (Mais Toi, tu étais plus profond que le tréfonds de moi-même et plus haut que le très-haut de moi même) ». 

Dans sa théologie, le poids du péché et de l’habitude du péché est tel que sans la grâce  divine l’homme ne peut pas se sauver : c’est le sens de la lutte contre le pélagianisme, qui  soutient l’inverse. Au XVIesiècle et au XVIIesiècle, le protestantisme et le jansénisme, qui  reprendront ses thèses, s’adresseront, comme Augustin de son temps, plutôt aux classes  moyennes actives qu’à l’aristocratie usuellement plus pélagienne. En lien avec sa théologie,  il distingue fortement le monde (lié à l’amour de soi), de la Cité de Dieu (liée à l’amour de  Dieu) — un terme plus république romaine, qu’il préfère à celui de royaume de Dieu. 

Augustin d’Hippone vient juste après les apôtres dans le monde chrétien. Son ouvrage la Cité de  Dieu pas toujours bien compris sert de creuset à l’ordre politique et social qui se met en  place. Son aura est telle durant cette période que toute œuvre anonyme de qualité lui est  attribuée par les copistes, de sorte que son œuvre déjà volumineuse s’accroît encore. Par  exemple, on lui attribue les Méditations dont on découvrira plus tard qu’elles sont l’œuvre  de Jean de Fécamp. 

Boèce (480-526) reprend des thèmes augustiniens en leur donnant un tour plus technique,  plus fondé sur la logique aristotélicienne qui sous-tend la tradition platonique  de Proclus (410-485) et d’Ammonios (fils d’Hermias). Plus tard, les  œuvres Periphyseon appelé aussi De divisione nature, et le De prædestione de Jean Scot  Érigène (810-870), sont également marquées par la pensée d’AugustinStone 2001, p. 254. 

Augustin d’Hippone inspire au milieu du XIesiècle non seulement Anselme de Canterbury et Abélard mais aussi leurs adversaires : Pierre Damien et Bernard de Clairvaux.  Toutefois si l’on en croit Henri-Irénée Marrou, c’est l’école de l’abbaye de Saint-Victor autour de Guillaume de Champeaux qui au XIIesiècle est la plus « intimement inspirée de  l’augustinisme ». Si des communautés de chanoines réguliers continuent de suivre la règle  d’Augustin — qui inspire au XIIIesiècle la règle des dominicains —, la règle bénédictine  de Benoît d’Aniane et de Bernard de Clairvaux s’impose dans les monastères. 

Durant la période suivante, la pensée d’Augustin demeurera très présente grâce au Livre des  sentences de Pierre Lombard (1095-1160) qui sert de base à l’apprentissage de la théologie  jusqu’à la fin du XIIIesiècle.

Ses principales œuvres sont : 

  • Les confessions. 
  • La cité de Dieu. 
  • De la trinité.  
  • La doctrine chrétienne.  
  • La vision de Dieu. 
  • Les aveux…… 

Avec Ambroise de Milan, Jérôme de Stridon et Grégoire le Grand, Saint-Augustin est l’un  des quatre Pères de l’Eglise. La fin de sa vie coïncide avec les derniers jours de l’Empire  romain. Il meurt lors du siège de la ville par un chef barbare, Genséric, en 430. Près de 900  ans plus tard, il est canonisé par l’Eglise catholique, et considéré comme l’un des docteurs  de l’Eglise. 

 

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